#monpostpartum (après césarienne d’urgence et séparation)

~ la fin de mon récit d’accouchement (à lire entièrement avant cet article) : « Le pédiatre l’a récupéré avec mon mari pour prendre soin de son petit cœur épuisé. Et moi, je me suis endormie vidée – en tout point – et terrifiée ne comprenant pas pourquoi j’entendais une agrafeuse résonner. »

#monpostpartum
(après césarienne d’urgence et séparation)

Mon réveil

Je me suis faite réveiller par le pédiatre deux heures plus tard. Depuis tout ce temps, j’étais surveillée par l’une des infirmières présentes au bloc. Il était accompagné d’une auxiliaire puéricultrice, venue pour m’aider à exprimer mon colostrum.

Le pédiatre m’a donné des nouvelles de mon Bébé. Mon petit allait être transféré au CHU car la clinique n’avait pas tout le matériel dont il avait besoin. J’avais très froid, mes larmes coulaient, je n’avais aucune force et je ne sentais toujours pas mes pieds.

L’infirmière m’a couverte et à l’aide de l’auxiliaire puéricultrice, j’ai exprimé mon colostrum. J’avais énormément de mal à garder les yeux ouverts tant j’étais épuisée. Je me sentais aussi extrêmement mal à l’aise étant très pudique. Jamais je ne m’étais imaginée une telle « première tétée ».

Son départ

Lorsque j’ai commencé à sentir mes jambes à nouveau, on m’a mise dans un fauteuil roulant pour aller voir mon Bébé. Je crois n’avoir jamais été si pressée de toute ma vie… J’avais le trac aussi !

Physiquement, je ne me sentais pas bien du tout – comme si je me réveillais d’une longue nuit très alcoolisée.

Je suis arrivée en néonat, j’ai retrouvé le sourire mon mari et lui, tout petit dans son petit lit. Et il m’a tellement impressionnée, il était si beau et déjà si fort. Je ne me souviens plus qui mais quelqu’un la posé dans mes bras. J’ai demandé à mon mari de m’aider, car j’avais très peur de le faire tomber. Je l’ai serré contre mon cœur. Et je lui ai fait un million de bisous gardant les yeux fermés pour mieux réussir à me concentrer. Me connecter.

Il s’est passé une dizaine de minutes avant que le SAMU n’arrive. Ils avaient une couveuse immense et tellement terrifiante pour nous. La pédiatre s’est brièvement et sèchement présentée. Elle nous a dit que l’on nous donnerait des nouvelles, quelqu’un l’a pris de mes bras et ils sont partis avec Lui.

Ma première nuit

Avec mon mari nous sommes allés dans notre chambre rapidement. Plus le temps passerait vite, plus vite on le retrouverait.

À ce moment-là, j’étais obsédée par l’idée de me laver. Le sage-femme de garde pour la nuit est venu se présenter, et m’a donné un horaire maximum pour uriner sinon « il me reposera une sonde urinaire » (?). J’ai donc tout fait pour y arriver avant le gong. C’était extrêmement bizarre car je n’avais plus aucune sensation à ce niveau, je ne ressentais aucune envie ni d’uriner ni d’aller à la selle. Enfin bref, j’ai réussi et j’ai pu prendre une douche.

Ça y est, on était dans « l’après » et rien de ce que l’on avait pu projeter était entrain d’arriver. J’ai beaucoup pleuré, j’ai perdu beaucoup de sang aussi et cela m’a fait peur. Je savais que cela arriverait en accouchant par voie basse mais c’est comme si, passer par la case « césarienne » avait annulé tout ce que je pouvais savoir.

Les premières nouvelles

Je me sentais bizarre, je marchais difficilement, j’étais à côté de mes pompes, vidée d’énergie. Les tranchées sont arrivées alors que je tirais mon colostrum – ces contractions utérines post-accouchement, permettant à l’utérus de retrouver sa forme initiale. Elles étaient extrêmement douloureuses. Un peu comme les contractions de travail, elles arrivent, coupent le souffle puis repartent.

Nous avons eu des nouvelles de notre fils dans la soirée grâce à notre médecin généraliste. Elle avait appelé le CHU pour nous, les nouvelles étaient bonnes, il se battait fort.

J’écris cet article avec presque un an de recul et ce soir-là, j’étais complètement dans un autre monde. Mon cœur avait été brisé et continuait de l’être mais « ça allait ». J’ai vu le « positif », me disant que j’étais trop épuisée et que je souffrais trop pour m’en occuper. Mon mari m’a raconté leurs premiers moments et nous avons regardé en boucle les photos et vidéos qu’il avait prises pour moi.

Les larmes ont beaucoup, beaucoup coulé. Tard dans la soirée, on nous a communiqué le numéro de la réa néonat. Nous avons appelé directement puis dès notre réveil. « Un vrai guerrier » nous a-t-on dit plusieurs fois… mais ça, nous le savions déjà.

Mon mari est parti le rejoindre juste après notre petit déjeuner. Moi, j’ai attendu que l’on me dise si oui ou non, je pouvais être transférée.

Mon transfert

J’ai pu être transférée à midi, nous aurons donc été séparés et dans deux établissements différents pendant 21 heures.

Arrivée au CHU, aucun fauteuil roulant ne m’a été imposé. J’ai donc marché environ 700 mètres (des urgences gynéco à ma chambre, de ma chambre à la réa néonat puis de la réa néonat vers ma chambre où mon mari a trouvé un fauteuil et m’y a installée), 24h après la césarienne.

Nous nous sommes installés et les douleurs sont arrivées. Lorsque le sage-femme est venu, je lui ai dis que je souffrais vraiment beaucoup, je lui ai expliqué que j’avais dû marcher, ce à quoi il a répondu « Mais vous avez fait une folie, vous avez été opérée hier !! »… « Moi opérée ? Non ! Mon fils est né ! »

C’est bizarre à saisir mais je n’avais pas fait le lien (et parfois, il m’échappe encore), la césarienne était « seulement » la façon dont était né mon fils mais il n’y avait aucun lien avec mon corps.
En en discutant avec ma doc’, elle m’a dit qu’il s’agissait d’un mécanisme de défense. Mon esprit a dissocié mon corps de la naissance de Bébé pour rester en vie. L’angoisse et la violence ont été si intenses, que si mon esprit ne s’était pas défendu , je serais morte d’angoisse sur place. Oh ok..! 😳

Les douleurs physiques

Je suis restée hospitalisée 6 jours complets (naissance, nuit à la clinique et CHU). Je prenais les antidouleurs qui m’étaient autorisés mais j’avais l’impression qu’avec ou sans, rien ne changeait trop finalement.

Les douleurs post-césarienne sont réputées pour être plus difficiles qu’un accouchement voie basse mais là, elles dépassaient l’entendement. Futures mamans césarisées, ne marchez JAMAIS autant 24h après l’accouchement.

Entre ces douleurs, les tranchées et le manque de ma petite famille réunie, je dormais 2h par jour. Aucune position ne me soulageait, allongée, semi-assise, assise, debout… Je me disais que je préférais encore vivre les contractions de travail que j’avais vécu plutôt que d’être là où j’étais.

Je devais échafauder des plans pour faire le trajet « lit > salle de bain » lorsque mon mari n’était pas là pour m’aider : je m’aidais de mes bras pour bouger mes jambes et les mettre une à une au sol, grande inspiration, je m’agrippais à tout ce qui me passait sous la main pour me lever et « marcher », faisant traîner mes orteils par terre pour qu’il y ait le moins d’impact possible. Une nuit, une sage-femme m’a proposé un pain de glace pour me soulager un peu : la meilleure idée !

Étant de base mal-à-l’aise avec les soignants et encore plus glacée suite à l’accouchement, je n’arrivais pas à demander leur aide. Sauf une nuit où j’avais si mal qu’après 40 min d’essais pour descendre de mon lit, j’ai bipé pour avoir de l’aide et j’ai eu « .. BA vous n’arrivez pas à le faire seule ?… 🤨😒 » « Ba si en fait, c’est pour ça que je vous appelle 😁 » (j’avoue je n’ai pas attendu qu’elle referme la porte pour pleurer).

Enfin bref, j’ai eu ces douleurs au ventre et du mal à marcher (éternuer, rire, m’étirer, m’allonger, m’asseoir, me lever) pendant plus d’un mois. Les tranchées ont durées une dizaine de jours et les lochies 8 semaines mais ça, je ne me souviens pas l’avoir mal vécu.

La cicatrice

Le soir après l’accouchement, quand le sage-femme est venu contrôler la cicatrice j’ai eu très peur d’avoir mal mais pas du tout. Je ne ressentais presque à ce niveau.

Les agrafes

Une infirmière à domicile m’a enlevé une partie des agrafes (1 sur 2) à J7 post-accouchement. L’autre partie a été faite à J9 par une infirmière des urgences gynéco. Je l’ai appris qu’après mais, lorsqu’un bébé est hospitalisé, la maman césarisée peut être suivie par les infirmières des urgences gynéco. Et ce, que ce soit pour les agrafes ou pour le lovenox !

Suite à l’ablation de la première partie des agrafes, l’une d’elle avait été surélevée mais pas enlevée ce qui m’a valu une douleur difficilement supportable mais à ce moment là, je ne savais pas à quoi elle était due. Le lendemain, l’infirmière des urgences gynéco a regardé après qu’elle ait fait mon injection de lovenox (piqûre dans la cuisse pendant 15 jours pour éviter une phlébite il me semble) et m’a dit que j’étais à vif et qu’à chaque mouvement l’agrafe faisait un va-et-vient #cool ✌🏽.

C’est cette même infirmière qui a enlevé le reste à J9, elle a été d’une douceur extrême et je n’ai absolument rien senti ! C’était la première fois que l’on prenait vraiment soin de moi et à ce moment-là, j’ai tellement pleuré de reconnaissance !

Cette cicatrice j’ai mis plus de 3 semaines avant d’oser la regarder. La première fois que je l’ai vu c’était en photo. C’est mon mari qui a pris soin d’elle, et de moi. Il y a eu une période où elle me grattait beaucoup et ça s’est calmé. J’utilisais un savon doux saponifié à froid pour la nettoyer et mon baume au calendula pour cicatriser. Elle m’a beaucoup tiré, ça s’est apaisé mais elle me tire encore parfois et je ne la regarde toujours pas.

Je me suis posée la question, et si un jour j’avais la possibilité de l’enlever, est-ce que je le ferais ? La réponse est non, elle est peut-être synonyme d’énormément de souffrance mais c’est elle, la seule, qui la légitime.

La douleur psychologique

Nous sommes rentrés à la maison à J11.
Nous avions laissé les ballons de la babyshower pour célébrer notre retour et cette nouvelle vie à 3 et clairement, c’était une très bonne idée parce que les souvenirs qu’ils m’évoquaient m’ont réchauffé le cœur.

La tristesse infinie

Les larmes coulent toujours aujourd’hui lorsque je pense à sa toute première nuit de vie. Loin de moi. Loin de nous. Il a dû me chercher, il a eu besoin de téter, il a eu besoin de mes bras et des battements de mon cœur.

La douleur en regardant la toute première vidéo de ses toutes premières minutes de vie, de sa petite langue qui tétait, cherchant mon sein.

La douleur de ne pas avoir été ensemble. Son papa devait jongler entre nous 2 mais plus avec lui, pour le bien de nous 3.

La douleur du souvenir de ses pleurs lorsque j’ai quitté pour la première fois sa chambre de réa néonat.

La douleur de ne pas avoir pu lui donner son premier bain, ne pouvant pas tenir debout. De n’avoir pu changer sa couche qu’à J6.

La douleur en entendant « mais on oublie tout quand on a notre bébé contre nous » alors que moi, je ne l’ai pas vécu.

Ou « vous êtes en vie c’est le principal » alors oui dans l’absolu… mais malheureusement, cette phrase n’efface ni la césarienne (et ce qu’elle engendre), ni la séparation !

La colère

La colère aussi, parce que rien n’a été simple, parce que j’avais trop mal, parce que son tout début de vie n’a pas été paisible, parce que ça a remis tellement de choses en question, parce qu’on a eu tellement de mal à rattraper notre allaitement.

L’angoisse

Et forcément, l’angoisse de le perdre. Décuplée. Vérifier qu’il respire à chaque seconde, ne plus dormir.

J’ai senti que je perdais pieds alors j’ai écrit à ma maternité début juillet. Ma gynéco m’avait conseillé de le faire lors de la consultation postnatale, choquée de ce qui avait pu se passer. D’ailleurs, lorsque je lui ai raconté l’accouchement, elle m’a tout de suite donné le nom la sage-femme (que j’ignorais encore jusque-là) et après mon courrier, il s’est avéré que c’était bien elle… Je n’ose pas imaginer les dégâts qu’elle a pu causer.

Mon fils venait d’avoir 3 mois et il fallait que ça sorte, pour mon bien, celui de ma famille et celui de celles qui passeraient après moi. Je pensais que ça me ferait du bien d’écrire et que cette sage-femme sache que ses paroles ont brisé mon jeune cœur de maman. J’ai accepté la médiation mais je n’aurais jamais dû. Je vous passe son regard antipathique et son ton hargneux – elle n’a jamais reconnu ses tords, ne m’a pas demandé pardon et pire, j’étais selon elle, une menteuse. « Je suis désolée, ce n’est pas ce à quoi vous vous attendiez… Elle a un caractère très fort… » m’a dit la responsable qualité.

Cet entretien m’a anéanti.

Il a eu 4 mois. Puis 5. Et je pensais que j’irais mieux quand il aurait 6 mois. Mais ça n’est pas arrivé et je culpabilisais. Et il a eu 7 mois. Puis 8…

Et puis j’ai pris RDV avec une sage-femme bienveillante, conseillée par ma doc’, pour lâcher prise. Je lui ai tout raconté, dit comment je me sentais. Elle a repris toutes les étapes d’une « césarienne normale » avec moi, point par point. Encore une fois, les larmes ont beaucoup coulé mais pour la première fois, on mettait des mots sur ce que j’avais vécu. Les mots qui auraient dû être prononcés le jour J.

Le sentiment de viol

J’avais l’impression que j’étais semblable à une éponge gorgée d’eau, imprégnée de douleur. Cela faisait quelques mois que je disais à mon mari que j’avais un sentiment de viol lié à la césa. Je connais bien le poids de ce terme.

Je revoyais le sage-femme de garde le soir de l’accouchement me disant que j’avais jusqu’à 21h pour uriner sinon il me REposerait une sonde urinaire… « Ah bon parce que l’on m’en avait posée une ? Mais à quel moment ? » Bien sûr, qu’il fallait la poser.. mais c’était possible de le faire ET de me prévenir ET de m’expliquer ce que cela impliquait, même si pour eux, il s’agissait là de gestes habituels, il n’y avait rien d’habituel pour moi et ces gestes étaient intrusifs.
Et puis j’étais à moitié nue, je ne pouvais pas bouger, mon intimité m’était cachée, j’étais « consciente » et plusieurs inconnus sans aucune bienveillance, en tout cas pour moi, me regardaient et me touchaient… Quelle violence !

Avec le recul, je suis convaincue qu’il faut faire une préparation concrète à la césarienne pour toutes les femmes, pas seulement pour celles qui sont programmées. Parce que quand elle nous tombe dessus violemment et que l’on ne sait pas à quoi s’attendre, c’est d’autant plus violent.

Le bonheur

Aujourd’hui, même si j’ai encore des séquelles, je vais mieux. Je n’ai plus le besoin d’en parler tous les jours même si j’y pense. Je ne pleure plus systématiquement non plus et ça, c’est un très grand pas. Cette épreuve m’a énormément faite grandir. Et je vis au jour le jour, me reconstruisant, bien entourée et reconnaissante de ce que j’ai.

Mon mal-être n’a jamais été dirigé vers mon fils au contraire, il m’a donné les forces de me battre. C’est le « moi femme » qui a été attaqué de plein fouet, le « moi maman », lui, a vite repris le contrôle lorsque nous sommes rentrés chez nous.

Nous avons été propulsés dans cette nouvelle vie de parents à cent mille à l’heure. J’avais toujours su qu’il vivrait, que j’étais faite pour être maman. Sa maman. J’étais prête.
Cela n’empêche que l’avoir dans mes bras pour la première fois m’a complètement bouleversée, me sentant encore plus petite que lui.

Je l’ai toujours aimé.

De tout mon cœur, de toutes mes tripes. L’Amour qui vous permet de déplacer des montagnes – vous savez, l’Amour qui vient d’en haut.
Il m’a permis d’en apprendre tellement sur moi, sur mon corps, sur ma force et sur mes faiblesses aussi, il m’a élevé.

Cette première année a été décisive. On a profité pour mille. On a usé et abusé des tétées et des peau à peau. Des milliards et des milliards de bisous et de câlins. On s’est aimé encore plus fort. Je suis tellement reconnaissante de l’avoir vécue avec mon premier amour, qui s’est révélé être un papa merveilleux.

Je ne pensais pas que je serais capable d’écrire ces mots un jour mais ça y est, semblable aux saisons, dans mon cœur aussi, l’hiver laisse place au printemps.

Aly

VOUS AIMEREZ SÛREMENT

4 comments

  1. Waaaah eh ben… moi qui suis infirmière en mater, salle de naissance et bloc… ça m’intéressait vraiment de lire ton récit d’accouchement ! Et je suis un peu outrée et tellement désolée que tu sois tombé sur des soignants malveillant et qui ne t’ont clairement pas accompagné ! Bravo d’avoir su poser des mots précis sur ce que tu as vécu et de l’avoir si bien retranscrit !! Ton fils peux être fière de sa maman, et tu peux être très fière de toi avec tout ce que tu as dû encaisser !! 💪🏽😘

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